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mardi, juin 14, 2016

Tenté par les affaires avec l’Iran ? Ce qu’il faut savoir

Un marché de 80 millions de consommateurs est en train de s’ouvrir. 


L’appétit des Iraniens pour accueillir de nouveaux fournisseurs et investisseurs est réel.

Le monde entier se précipite à Téhéran. 

Les Iraniens sont impatients de profiter de l’ouverture économique promise par le gouvernement. « Les Français ont les délégations les plus performantes mais les Italiens sont très agressifs, constate un banquier iranien. Les études de faisabilité sont parfaites, le problème ce sont les grandes banques françaises qui ne suivent pas .»

Le hall du très moderne hôtel Azidi, au nord de Téhéran, est envahi par des délégations qui ne cessent de s'entrecroiser : Chine, Corée, Allemagne, Italie... Des centaines d'hommes d'affaires venus explorer la possibilité de refaire du commerce et d'investir en Iran grâce à la levée des sanctions après l'accord sur le nucléaire. 

Les Français ne sont pas en reste. Après les missions du Medef et de la CGPME, ce sont 42 PME chaperonnées par six chambres de commerce et d'industrie et le tout nouveau représentant de Business France à Téhéran, Romain Keraval, qui viennent nouer les premiers contacts en cette fin mai. Dans cette ville plutôt moderne plombée par une chaleur de 35° degrés, perpétuellement noyée sous un flot ininterrompu de voitures, le « speed dating » entre intermédiaires et chefs d'entreprise français et iraniens bat son plein dans les locaux de la Chambre de commerce et d'industrie d'Iran.

La société paraît plus ouverte qu'on pouvait l'imaginer. Les gens ont une soif de commercer et d'échanger dont je n'ai connu l'équivalent qu'en Chine », constate Pierre Garçon, PDG d'EcoMundo. La présence fréquente de femmes - dont les voiles légers et colorés sont parfois à peine retenus par un chignon haut placé -, qui ont souvent de hautes responsabilités managériales, surprend.

Les Iraniens sont impatients de profiter de l'ouverture économique promise par le gouvernement. « Les Français ont les délégations les plus performantes mais les Italiens sont très agressifs, constate un banquier iranien. Les études de faisabilité sont parfaites, le problème ce sont les grandes banques françaises qui ne suivent pas. »

Banquiers tétanisées et peu prêteurs

Le point d'achoppement est vite trouvé : comment se faire payer par des entreprises iraniennes qui manquent de fonds de roulement ? Comment réaliser des transactions et investir dans un pays avec lequel les échanges libellés en dollars sont encore interdits ?

« Les compagnies d'assurance nous accueillent à bras ouverts. Beaucoup d'industriels vont s'installer et vont prendre des commandes. Nous, on va être bloqués par les banques », se lamente Emmanuel Pellerin, directeur général de Cap Marine, un courtier d'assurances maritimes et de transport basé à Rouen.

Après les amendes records que les grandes banques françaises ont dû payer aux Etats-Unis pour avoir violé des embargos, elles sont tétanisées. « Mon banquier m'a menacé de fermer mon compte si jamais je prononçais à nouveau le mot "Iran" devant lui », ironise un chef d'entreprise.

Pour les vieux routiers du commerce en Iran, des circuits fonctionnent très bien, notamment par Dubaï. De petites banques européennes ou asiatiques, qui n'ont pas d'intérêts aux Etats-Unis, sont actives. Mais le problème du financement de projet est réel. Pour y pallier, certains Etats, comme l'Allemagne, l'Italie ou la Belgique, ont ouvert des lignes de crédit pour subventionner le commerce de leurs entreprises avec l'Iran.

                                            ***

Trois choses à savoir avant de mettre le cap sur l'Iran.

1. Se protéger avec le droit

Il faut encadrer les négociations par des accords de confidentialité avant d’entrer dans le vif des discussions. Et ne pas hésiter à encadrer le contrat par du droit français, qui a souvent inspiré la législation iranienne, comme de recourir à des juridictions françaises en cas de contentieux plutôt qu’à de l’arbitrage international, souvent très coûteux.

2. Faire sa « due diligence »

En Iran plus qu’ailleurs, les exportateurs français doivent s’assurer que leurs partenaires iraniens ne contreviennent pas aux sanctions encore en place. La détention d’un passeport américain par un manager iranien pourrait ainsi poser problème.

3.Trouver des moyens de paiement

Deux petites banques privées françaises, qui n’ont pas d’avoirs aux Etats-Unis, s’installent sur le marché des transactions avec l’Iran : Wormser Frères et Delubac & Cie. 

Source : Les Échos du 14 juin 2016

lundi, février 29, 2016

Le plus gros fonds souverain au monde autorisé à prêter à l'Iran

Le fonds de pension public norvégien, plus gros fonds souverain au monde, est de nouveau autorisé à acheter des obligations d'État iraniennes grâce à l'accord sur le programme nucléaire de ce pays, a annoncé jeudi la Norvège.

Le fonds, qui pèse près de 7.000 milliards de couronnes (environ 735 milliards d'euros), avec un objectif de 35% sous forme d'obligations, ne peut plus depuis janvier 2014 acheter des titres de dette de Corée du Nord, Syrie et Iran, trois pays soumis à des sanctions internationales.

Après l'accord nucléaire signé en juillet 2015 avec les grandes puissances, les sanctions économiques contre l'Iran sont toutefois en passe d'être progressivement levées.

"Le ministère des Finances a donc, en accord avec le ministère des Affaires étrangères (...), décidé que les restrictions concernant le négoce d'obligations d'État iraniennes soient levées", a indiqué le ministère dans un communiqué.

L'accord conclu l'an dernier à Vienne entre l'Iran et le groupe P5+1 (États-Unis, Grande-Bretagne, France, Russie, Chine et Allemagne) limite le programme nucléaire iranien au nucléaire civil en échange d'une levée progressive et réversible des sanctions économiques imposées à l'Iran depuis 2006.

Source : L'Orient le jour, 18 février 2016

Élections législatives : l'impact sur l'ouverture économique de l'Iran

 Les élections législatives iraniennes se sont tenues ce vendredi 26 février. Pour Denis Bauchard, elles seront déterminantes pour l'avenir de l'Iran, notamment sur le plan économique.


Denis Bauchard a été attaché financier pour les pays des Proche et Moyen Orients, ministre conseiller, chargé des questions économiques à la mission permanente de la France auprès des Nations Unies, ambassadeur en Jordanie puis directeur d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient au ministre des Affaires étrangères. Il a été président de l'Institut du monde arabe. Il est conseiller pour le Moyen-Orient à L'Institut français des relations internationales (Ifri).


LE FIGARO. - Quels sont les enjeux des élections législatives iraniennes, quels changements en attendre?

Denis BAUCHARD. - Les enjeux des élections législatives iraniennes sont majeurs pour l'avenir politique du président Rohani, et de manière générale pour le devenir de l'Iran, à la fois sur le plan politique et économique. Rohani a besoin d'un Parlement qui soit plus coopératif que ne l'est l'actuel, afin qu'il adopte facilement les réformes engagées. Les Gardiens de la Constitution, une instance qui filtre les candidatures pour les élections, a éliminé un certain nombre de réformateurs. Mais il semble que de nombreux candidats conservateurs modérés sont proches des idées de Rohani, et donc prêts à le soutenir.

Quel est le poids du Majlis sur la vie politique iranienne?

Ces élections ne seront vraisemblablement pas truquées. Ce que dira le Guide, Ali Khamenei, après les résultats influencera l'attitude des nouveaux parlementaires. En Iran, il n'y a pas de parti: ce sont des candidatures individuelles s'inscrivant dans différents courants, mais il n'y a pas de partis organisés, structurés de partis comme ils peuvent exister en Occident. Le Parlement iranien n'a pas de pouvoir très important, mais il a un pouvoir de «nuisance»: il peut gêner le président de deux façons. D'une part en ne votant pas les lois qu'il porte - c'est ce qui était arrivé au président Khatami (1997-2005), dont la politique réformatrice avait été obstruée par les blocages du Parlement -, d'autre part en n'approuvant pas ou en destituant individuellement des ministres - ce qui était arrivé sous la présidence de Mahmoud Ahmadinejad.

La question qui se pose est la suivante: Rohani pourra-t-il mener la politique, notamment économique, qu'il estime indispensable pour redresser le pays?

A la tête du pays depuis 26 ans, quelle a été l'évolution et quel est le bilan du guide suprême Ali Khamenei?

L'âge et la santé déficiente du Guide rendent probable l'avènement, au cours des huit ans du mandat des nouveaux parlementaires, d'un nouveau guide. Mais de même que les candidadures aux élections législatives ont été filtrées par les Gardiens de la Révolution, de même, les candidatures de religieux à l'assemblée des experts , trop éloignés de la ligne de Khamenei ont été écartés, notamment le petit-fils de l'ayatollah Khomeini, qui a la réputation d'être libéral.

En effet, il existe deux courants au sein des religieux. Certains dans la lignée de Khamenei soutiennent le velayat -è faqih, c'est à dire l'idée que le pouvoir devait être aux mains des clercs . A l'inverse, un certain nombre de religieux estiment que leur rôle n'est pas de tenir le pouvoir politique. L'enjeu est de savoir si la République islamique demeurera théocratique ou si le Guide définira les grandes orientations tout en laissant la main et le pouvoir politique au président.

Khamenei est resté le même sur ses principes, mais il a connu une évolution. Il a contribué à l'échec de Khatami et de sa politique de réformes. Ensuite, il a favorisé l'élection, puis la réélection d'Ahmadinejad. Ce dernier, prenant goût au pouvoir, a fait de l'ombre au Guide, à qui il s'est opposé à la fin de son second mandat. Le Guide a laissé faire l'élection de Rohani ; il a estimé qu'après les fortes tensions de 2009 [ndlr: le soulèvement qui a suivi l'élection présidentielle opposant Mahmoud Ahmadinejad à Mir-Hossein Mousavi, entachée de soupçons de fraudes], il convenait de calmer le jeu . Il a fait confiance en Rohani, avec lequel il entretient de bonnes relations.

Depuis l'arrivée de Hassan Rohani à la présidence de la République islamique, la politique de réforme économique s'est intensifiée. Un chantier à poursuivre?

Sur le plan de la politique intérieure, le redressement d'une économie sinistrée est le défi relevé par Rohani. La question de la levée des sanctions extérieures est évidemment primordiale, mais elle n'est pas la seule. Sous Ahmadinejad, il y a eu une mauvaise gouvernance économique se traduisant par un manque d'investissements, une inflation galopante, un très fort taux de chômage, en particulier chez les jeunes. Un autre défi est celui du respect des droits de l'homme dont la situation ne s'est pas améliorée depuis l'élection du nouveau président. Comment se positionnera le nouveau parlement sur la question de la liberté d'expression? Malgré l'élection de Rohani, la société reste verrouillée, un certain nombre de journalistes sont poursuivis, la peine de mort reste largement utilisée…

Avec la levée des sanctions, les exportations de pétrole, qui se trouve à un niveau très bas (1 M/bj) vont augmenter de façon progressive mais interviendront dans un marché très déprimé. La reprise des financements et du commerce avec les Occidentaux va se faire très progressivement car les modalités de levée des sanctions par l'OFAC (Office of Foreign Assets Control), l'agence du Trésor chargée de programmer et de faire respecter les sanctions, n'ont toujours pas été entièrement précisées. Les banques étrangères demeurent par conséquent extrêmement prudentes, notamment quant au financement des investissements en Iran.

Lorsque Rohani est venu à Paris, fin janvier 2016, il a fait savoir qu'il appartenait aux entreprises étrangères d'apporter les financements nécessaires à la réalisation des investissements ou des contrats commerciaux, notamment pour l'achat des 118 Airbus prévus. Mais les entreprises françaises ont en mémoire la décision d'un tribunal américain qui a imposé une amende record de 9 milliards à la BNP en mai 2015 pour non respect des sanctions . Or les Etats-Unis ont maintenu des sanctions motivées par les atteintes aux droits de l'homme ou des actions de terrorisme, dont certaines datent de 1996. Les Européens en particulier restent ainsi très prudents, compte tenu de l'usage abusif du principe d'extra-territorialité du droit américain qui fait que libeller un contrat en dollars US vous rend justiciable des tribunaux américains.

Les réformateurs ont-ils raison de capitaliser sur l'électorat féminin et jeune?

Les conservateurs suscitent en effet une réaction de rejet d'une majorité de jeunes et de l'électorat féminin. Mais ce scrutin sera sans doute marqué par une abstention importante. Un certain nombre de jeunes sont désabusés sur la capacité du pouvoir à changer de poltique. La politique de Rohani, notamment son accord sur le nucléaire, n'a pas encore modifié substantiellement la vie quotidienne des Iraniens, la levée théorique des sanctions venant juste d'intervenir. 

Quelles seront les répercussions de ces élections sur l'ouverture de l'Iran au monde extérieur?

Quel que soit le résultat, il n'y aura pas d'inflexion sensible. L'accord nucléaire trouvé avec les Etats-Unis n'est pas synonyme d'un apaisement durable des relations irano-étasuniennes. La lutte contre les «infiltrations», c'est-à-dire le risque d'ingérence voire de «regime change» mené par les pays occidentaux, Etats-Unis en tête, devrait se poursuivre. La politique moyen-orientale, en Syrie et en Irak ne connaîtra pas de changement sensible. L'alliance stratégique avec le régime syrien, qui remonte à 1970, reste toujours en place. Mais on peut espérer que les Iraniens, inquiets des progrès de Daech, favoriseront une solution de sortie de crise, qui pourrait être concertée avec la Russie et les pays occidentaux.

Le Figaro du 28 fevrier 2016


dimanche, février 14, 2016

zone interdite pour les grandes banques américaines

L'Iran reste une zone interdite pour les banques américaines en dépit de la levée de certaines sanctions, une interdiction frappant également leurs rivales étrangères souhaitant utiliser le dollar.


« De façon générale, le principal embargo américain reste en place », a déclaré récemment devant des parlementaires John Smith, le directeur de l'Office pour le contrôle des avoirs étrangers (Ofac), qui dépend du Trésor. Si l'administration Obama a accepté de lever depuis mi-janvier des sanctions nucléaires contre Téhéran, elle continue d'imposer un embargo lié aux violations des droits de l'homme et au terrorisme.


Baptisées « sanctions principales », elles interdisent aux Américains d'effectuer tout investissement lié à l'Iran. Les sanctions dites « secondaires » s'appliquant aux non-Américains ont été levées. 

« Rien n'a changé pour nous », confirme à l'AFP un banquier new-yorkais. « Nous ne pouvons pas accorder de crédit ou financer d'activité liée de près ou de loin à l'Iran », poursuit-il sous couvert d'anonymat. 

Les sociétés iraniennes, le gouvernement iranien ou des Iraniens ne peuvent ainsi toujours pas ouvrir de comptes auprès de banques américaines.

Pourtant, à Wall Street, on ne cache pas que l'Iran, dont tous les pans de l'économie sont à reconstruire, offre beaucoup d'occasions. La plupart des banques ont ainsi recruté des cabinets d'avocat spécialisés et des experts pour leur dire ce qui était possible de faire ou pas au cas où la situation se débloquerait. « Nous continuons de surveiller les développements en Iran », confie laconiquement Kamran Mumtaz, un porte-parole de Citigroup.

Menaces


La même prudence s'applique aux grandes banques étrangères présentes aux États-Unis puisqu'elles « doivent continuer à s'assurer qu'elles n'effectuent aucun paiement ni aucune transaction en dollars impliquant l'Iran via les institutions financières américaines », prévient l'Ofac.


Aucun paiement en dollars à une entité liée à l'Iran n'est autorisé, ajoute John Smith, menaçant de représailles toute infraction. « Ceci signifie qu'une personne non américaine qui fait des transactions importantes ou fournit un service matériel (lié à l'Iran) risque d'être coupée du système financier américain », argue le responsable. 

En 2014, les autorités américaines ont infligé une amende record de près de 9 milliards de dollars à la banque française BNP Paribas pour avoir notamment effectué des paiements en dollars liés à l'Iran.


Les banques doivent isoler tout argent iranien des actifs américains et renforcer leurs contrôles internes, renchérit le cabinet Clifford Chance, qui a réalisé un memo pour JPMorgan. Il explique que « beaucoup d'entreprises voulant faire des affaires ou investir en Iran (...) risquent de connaître des tensions en interne entre des personnes qui voudront tirer profit des opportunités offertes et celles dont les responsabilités sont de gérer les risques et la conformité aux lois ».


Les États-Unis ont aménagé quelques exceptions très encadrées : les banques peuvent financer ou prêter de l'argent aux entreprises ayant obtenu une licence spéciale du Trésor pour vendre des pièces détachées d'avions de ligne ou procéder à la révision de moteurs d'avions iraniens. Boeing et General Electric ont obtenu de telles autorisations. « Nous pouvons aussi octroyer un crédit ou financer des entreprises important des tapis iraniens ou des produits alimentaires » tels des pistaches et du caviar, indique un banquier new-yorkais.


Même dans ce cadre, « il subsiste un grand nombre de risques », met en garde Howard Mendelsohn, de Camstoll Group, faisant remarquer que les gardiens de la révolution contrôlent de nombreux secteurs de l'économie. Or, ils font partie de la liste américaine des organisations terroristes qui comprend 200 entités et individus.


« Il est difficile de dire à qui appartient quoi en Iran. Il y a un gros manque de transparence (...) » dit à l'AFP un expert, recruté par Wall Street sur la question.


Dans ce contexte, les établissements américains préfèrent rester sur la touche de peur d'entacher leur image.

Luc OLINGA/AFP

www.lorientlejour.com

lundi, février 08, 2016

Les assureurs ont des perspectives prudentes vis-à-vis de l'Iran

Les assureurs internationaux s'intéressent beaucoup à l'Iran, à la suite de la levée des sanctions internationales touchant le pays, et ils pourraient manifester leurs intentions dès le mois de mars, lorsque certaines sociétés iraniennes solliciteront un renouvellement de leurs polices.

Assureurs, réassureurs et courtiers veulent exploiter un marché représentant 7,4 milliards de dollars (6,85 milliards d'euros) de primes, l'accord sur le nucléaire passé entre Téhéran et les grandes puissances occidentales ayant débouché sur la levée de l'encadrement des transactions financières avec l'Iran ce mois-ci.

Allianz, Zurich, Hannover Re et RSA, entre autres, ont fait savoir ces derniers jours qu'ils évaluaient les possibilités offertes par l'Iran. 

De l'avis des experts, les secteurs maritime et de l'énergie sont les plus prometteurs. L'assurance-vie également dans la mesure où elle représente moins du dixième de toutes les primes payées en Iran contre plus de la moitié au niveau mondial.


Assureurs, réassureurs et courtiers veulent exploiter un marché représentant 7,4 milliards de dollars (6,85 milliards d'euros) de primes, l'accord sur le nucléaire passé entre Téhéran et les grandes puissances occidentales ayant débouché sur la levée de l'encadrement des transactions financières avec l'Iran ce mois-ci.

Il est probable que dans un premier temps les assureurs internationaux s'allieront à des sociétés iraniennes pour profiter de leur expérience locale et pour réassurer les assureurs locaux sur le marché international, ajoutent les experts, les courtiers les aidant à ces fins.
Les assureurs américains ne pourront pas en profiter car il leur est encore interdit de faire des affaires en Iran en raison de sanctions nationales qui restent en vigueur.
Les contrats d'assurance de certaines sociétés iraniennes arriveront à échéance à la fin de l'année perse, fin mars, et, à l'exemple de ce qui se pratique dans les pays occidentaux en janvier, elles solliciteront leur renouvellement. Il pourrait y avoir dans le lot de ces sociétés des assureurs souhaitant renouveler leurs polices de réassurance. 
"Nous avons eu suffisamment de visites (de firmes étrangères) (...) Reprendre les affaires pourrait être rapide, mais cela dépendra des conditions qu'elles nous proposent", explique Mohammad Asoudeh, vice-président et directeur général d'Iranian Reinsurance. Sassan Soltani, directeur du développement régional d'Iran Insurance Company, dit que la société a été contactée par des assureurs et courtiers britanniques et japonais.
EN ATTENTE DE NOTATION
La levée des sanctions est toutefois une condition nécessaire mais non suffisante pour faire de l'assurance en Iran.
Le fait que les sanctions américaines restent en place soulève des interrogations sur la possibilité qu'auront les autres assureurs étrangers de faire des opérations en dollar avec l'Iran sans s'exposer au risque d'être eux-mêmes mis à l'index.
Pour autant, United Insurance Brokers (UIB), un courtier basé à Londres, confie qu'il s'occupait de réassurance en Iran avant que ne tombent les sanctions internationales et ajoute qu'il compte rouvrir son bureau de Téhéran "dès que possible", selon son président Bassem Kabban.
"Nous avons cessé notre activité à cause des sanctions mais nous avons maintenu les salaires de nos employés sur place durant les 66 derniers mois", dit Bassem Kabban, ajoutant que se posait le problème pour les assureurs d'un éventuel actionnariat américain ou de l'existence de filiales américaines.
D'après lui, les sociétés françaises et japonaises arriveront sans doute en tête sur un marché iranien de la réassurance où elles étaient bien implantées par le passé et des secteurs tels que l'aviation, l'électricité et l'énergie ont de gros besoins de couverture des risques.
Un autre courtier basé à Londres juge qu'il n'est pas question pour l'instant de s'implanter à Téhéran, préférant s'épargner le risque d'être "à l'avant-garde".
L'Iran compte 27 compagnies d'assurance et deux de réassurance, la plupart créées ces dix dernières années, mais, n'ayant pas accès aux marchés internationaux, elles ne font pas non plus l'objet de notations.
Un point susceptible de dissuader leurs homologues internationales, et leurs services soucieux d'éviter toute sanction, de faire affaire avec elles.
Iranian Reinsurance s'emploie à obtenir une notation et discute avec deux agences en ce sens, dit Mohammad Asoudeh, sans donner leur nom. "En raison des sanctions, elles ne pouvaient faire aucun évaluation, c'est pourquoi c'est notre priorité; plusieurs autres compagnies d'assurance iraniennes attendent également d'être notées." 
A l'heure actuelle, 4% environ du total des primes d'assurance iraniennes sont rétrocédées à des réassureurs, ce qui équivaut à peu près à un volume d'affaires de réassurance de 300 millions de dollars en Iran, explique Mohammad Asoudeh. Ce volume devrait rapidement augmenter avec la multiplication des échanges avec des intervenants étrangers.

Biovac et ses autovaccins décrochent un gros contrat avec l’Iran

La PME de cinquante salariés de Beaucouzé, aux portes d'Angers (Maine-et-Loire), va fournir des autovaccins pour animaux à l'Iran. Le contrat pourrait s'élever, à terme, à plusieurs millions d'euros. Entretien avec Christophe Tremblay, docteur vétérinaire et président de Biovac.

Comment êtes-vous arrivé à signer avec les Iraniens ?
La France a deux domaines d'excellence dans mon métier : l'élevage de volailles et de porcs ; les autovaccins. Ces derniers sont faits sur mesure. On part de bactéries prélevées dans un élevage et on fait un vaccin pour cet élevage. Les autovaccins se sont beaucoup développés en France.
Je me suis rendu compte que nous avions une belle expertise en me frottant aux marchés européens. Du coup, nous sommes allés plus loin en contactant une entreprise iranienne. Un marché que nous connaissons déjà. Nous leur vendons des réactifs de diagnostic vétérinaire pour les volailles.
Quelle est l'importance de ce marché ?
Le potentiel est énorme. Les Iraniens ont pour seules sources de protéines les volailles et les poissons, deux productions intensives en Iran. Problème : ils sont confrontés aux maladies. Les autovaccins n'y existent pas. Or c'est une belle alternative aux traitements antibiotiques.
Ce marché peut représenter plusieurs millions d'euros. Il reste complexe, très politique. Toutes les autorisations passent par les autorités. À nous de performer et de savoir travailler avec eux.

Concrètement, comment va s'organiser la production ?
Dans un premier temps, ces vaccins seront fabriqués chez nous puis testés et distribués en Iran. Par la suite, l'objectif est de doter notre partenaire iranien d'une structure susceptible de produire ses propres autovaccins, après fourniture des bactéries inactivées par BioVac.
Quelle incidence pour votre entreprise en matière d'investissements et d'emplois ?
Tout dépend de l'ampleur que cela va prendre. Il faudra imaginer un agrandissement de nos locaux et des embauches, bien sûr. Vous savez, c'est un peu comme l'histoire des Rafale vendus à l'Inde. Il y a une demande, nous sommes bien placés mais il faut que cela s'engage.
Je trouve intéressant qu'une PME de cinquante salariés, qui a une excellence dans son métier de fabrication de vaccins, décroche ce genre de contrat qui pourrait être réservé aux très grosses entreprises. Les PME aussi peuvent réussir !

Source : Ouest France Entreprise

mercredi, février 03, 2016

Les banques occidentales hésitent à financer les entreprises dans leur conquête du marché iranien

Malgré les très belles perspectives qu'offre le marché iranien depuis la levée des sanctions contre Téhéran, les banques restent prudentes et peinent à s'engager dans ce pays, craignant toujours d'être mises à l'amende par les Etats-Unis.

La visite du président iranien Hassan Rohani à Paris, quelques jours après l'entrée en vigueur de l'accord nucléaire, a été l'occasion d'annoncer jeudi une flopée d'accords commerciaux, pour un montant "potentiel" de 15 milliards d'euros, selon l'Elysée.

Pour autant, derrière ces annonces se cache la question du financement des investissements en Iran.

Car aujourd'hui les banques européennes hésitent à se lancer, échaudées par les pénalités infligées par Washington à certaines d'entre elles pour avoir violé les embargos américains sur certains pays, dont l'Iran.

L'exemple le plus spectaculaire reste l'amende record de 8,9 milliards de dollars imposée à BNP Paribas en 2014.

"Nous ne prenons aucune initiative nouvelle dans le domaine", a confié à l'AFP une grande banque française, préférant garder l'anonymat.

"Il y a eu la levée des sanctions mais concrètement cela manque encore beaucoup de clarté", a indiqué cette source, soulignant que les interprétations entre les Américains et l'Europe n'étaient "pas alignées".

La question inquiète aussi d'autres établissements bancaires en Europe.

"Deutsche Bank a pris acte de l'assouplissement des sanctions américaines et européennes contre l'Iran", a indiqué à l'AFP la banque allemande, qui a quitté le pays fin 2007 et écopé en novembre d'une pénalité américaine de 258 millions de dollars. "Jusqu'à nouvel ordre, le groupe s'en tiendra à sa décision et ne fera pas d'affaires liées à l'Iran", a-t-elle ajouté.

'Incertitude' sur les sanctions

"Il y a une incertitude", a déclaré Yves-Thibaut de Silguy, vice-président du Medef International sur France Info jeudi, soulignant que les Etats-Unis appliquaient la levée des sanctions nucléaires, mais que d'autres sanctions américaines restaient en vigueur, notamment contre le terrorisme.

Le secrétaire d'Etat au Commerce extérieur Matthias Fekl a indiqué jeudi avoir demandé aux autorités américaines une "clarification" sur le calendrier et le périmètre de levée des sanctions à l'OFAC (Office of Foreign assets control), un organisme américain de contrôle des avoirs étrangers.

Pour Thierry Coville, chercheur à l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), les Etats-Unis entretiennent volontairement le flou sur l'état des sanctions.

"Cela peut être une politique américaine de dire +attention c'est compliqué+ pour que l'on n'y comprenne rien et que l'on croie qu'elles sont toujours là", déclare-t-il.

"Légalement, les banques peuvent faire des choses", mais il leur faut "toutes les assurances du monde pour qu'elles reviennent en Iran", estime-t-il.

Pour l'heure, même si elles se positionnent sur le marché iranien, elles préfèrent rester discrètes sur leurs intentions. "Je vois mal comment des grands groupes peuvent conclure des contrats sans avoir de soutiens financiers", souligne l'économiste.

Selon Pascal de Lima, économiste en chef à Economic Cell, un cabinet de veille économique, l'Iran possède un bon potentiel économique, en dépit d'"un risque pays élevé" dû à "la situation géopolitique avec Israël et d'une confiance minée par la sanction de BNP Paribas".

Pour tenter de rassurer les entreprises, l'Etat français a annoncé mardi un accord permettant d'apporter les garanties publiques nécessaires aux investissements en Iran via la Coface, qui permettra de couvrir les risques d'impayés sur place.

En outre, des équipes spécialisées sur les questions des sanctions, opérant au ministère des Finances et celui des Affaires étrangères, se tiennent à disposition des entreprises souhaitant savoir si leurs activités sont en conformité avec la législation américaine, a rappelé jeudi M. Fekl lors d'un discours au Medef.

Mais selon M. Coville, avoir laissé l'OFAC "faire pression directement sur les banques européennes" était "une "erreur stratégique qui se paye aujourd'hui".

"Politiquement, c'est lamentable de la part des Européens", déplore-t-il. "Maintenant c'est une arme financière et géopolitique que les Etats-Unis ne vont pas se priver de réutiliser dans d'autres circonstances".

Investissements en Iran : attention à la responsabilité sociale des entreprises

Certes, l'économie iranienne va connaître une forte croissance, les besoins en infrastructures sont importants. Mais les risques juridiques et "réputationnels" pour l'investisseur en Iran le sont tout autant. Par Karim Lahidji, Président de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) et Pierre-Samuel Guedj, Président d'Affectio Mutandi, Président de la Commission RSE du CIAN - Conseil Français des Investisseurs en Afrique

La levée des sanctions économiques contre l'Iran, conditionnée au respect strict de l'accord sur la démilitarisation de son programme nucléaire, fait naître un Iran Rush risqué.

Bridée par dix ans d'embargo, l'économie iranienne devrait connaître une croissance de 4 à 5 % par an jusqu'en 2020. Besoins en infrastructures, technologies, financement, biens et services de grande consommation, autant d'opportunités pour les entreprises françaises, autant de risques.

Les violations des droits liées à l'activité économique et le commerce en Iran sont nombreuses : l'absence de législation pour protéger les travailleurs d'abus, de discrimination ou de harcèlement ; les syndicalistes qui sont systématiquement menacés et emprisonnés, voir même condamnés à mort ; des politiques et lois, comme la Loi Gozinesh, qui interdisent l'accès à certaines professions pour les femmes, les minorités religieuses ou ethniques, et les dissidents politiques; le recours au travail des enfants ; les expropriations illégales et les expulsions forcées en raison de projets de développement.

Les entreprises françaises doivent respecter les droits humains

Tout cela dans un contexte où la justice n'est pas indépendante, et où les lois sont appliquées de façon aléatoire selon le bon vouloir du régime. Faire des affaires en Iran c'est s'exposer aux violations quotidiennes des normes universelles de l'OIT et des droits humains. Sans compter sa 136ème place dans le classement 2014 de Transparency International sur la corruption...

Les entreprises françaises ont la responsabilité de respecter les droits humains dans l'ensemble de leurs activités, y compris en vertu de leurs relations d'affaires.

Des risques juridiques, sociétaux et réputationnels

La France doit également s'assurer que les entreprises sous sa juridiction ne contribuent pas à des violations des droits humains à l'étranger. Ces principes ont été internationalement reconnus, notamment par l'OCDE et l'ONU. Faute de respecter leurs responsabilités en matière de droits humains, les entreprises françaises s'exposent à des risques juridiques, sociétaux et réputationnels.

La justice française peut être saisie

Les français et les européens ne veulent plus que les produits qu'ils achètent soient réalisés par des enfants, ni que leur croissance soit le fruit d'un encouragement de la peine de mort par lapidation. Rappelons que les manquements allégués aux codes de conduite peuvent mener une entreprise au tribunal. Auchan, sur le dossier Rana Plaza, et Samsung, sur les conditions de travail en Chine, sont aujourd'hui l'objet de procédures en France pour pratique commerciale trompeuse. Rappelons aussi que l'éloignement des pratiques répréhensibles n'empêche pas la justice française de se saisir.

Vinci fait l'objet d'une enquête préliminaire pour esclavage

Des entreprises françaises ayant vendu du matériel de surveillance à des régimes autoritaires comme la Syrie et la Libye font en ce moment l'objet de poursuites devant les juridictions françaises pour complicité présumée d'actes de torture. Vinci en fait aussi les frais en étant l'objet d'une enquête préliminaire pour esclavage moderne dans un pays à gouvernance perfectible similaire, le Qatar. Dommage collatéral des grands marchés obtenus pour la préparation du mondial 2022. N'oublions pas non plus que cette levée des sanctions est progressive et conditionnée.

L'épée de Damoclès de la justice américaine

L'épée de Damoclès qui a mené, sur des enjeux de corruption et de financement du terrorisme, au démembrement d'Alstom et au paiement d'amendes sans précédent pour la BNP Paribas est toujours mobilisable par les autorités américaines... Le flou juridique entretenu par les Etats-Unis sur de telles poursuites extraterritoriales a conduit très récemment Yves-Thibault de Silguy, Vice-Président du Medef international, à s'exprimer publiquement pour prôner la plus grande prudence.

Face aux acteurs asiatiques et états-uniens, les entreprises européennes et en particulier françaises s'exposeraient à un risque juridique et réputationnel important si elles n'exercent pas leur responsabilité de diligence raisonnable en matière de droits humains avant toute relation commerciale en Iran.

Des opinions publiques attentives

Elles devront faire part de leurs exigences auprès de leurs partenaires commerciaux iraniens et en premier lieu les autorités publiques.

La société civile et l'opinion publique seront particulièrement attentives à la manière dont les entreprises françaises respecteront leurs responsabilités et engagements en matière de droits humains dans leurs opérations en Iran. Leurs collaborateurs et consommateurs aussi ...Tandis qu'en 2015 on finalise un accord menant à une ouverture économique attendue en Iran, le pays commet plus d'exécutions annuelles (qu'on estime à près de 1000 personnes) qu'au cours des 25 dernières années. 

Les entreprises françaises sont-elles prêtes à faire des affaires dans un tel contexte ?

Source : La Tribune du 2 février 2016

dimanche, janvier 31, 2016

Écologie : La grande catastrophe iranienne, c’est maintenant !

L’Iran court à la catastrophe écologique. Un haut responsable iranien, ancien ministre de l’agriculture, a récemment tiré la sonnette d’alarme: lacs et cours d’eau sont asséchés, et les deux tiers de la population pourraient être contraints d’émigrer si rien ne change. Les raisons de ce désastre? Elles sont avant tout politiques et idéologiques.


La signature, le 14 juillet 2015, après deux ans d’intenses négociations entre l’Iran, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité et l’Allemagne, d’un accord sur le nucléaire qui prévoit une levée progressive des sanctions économiques, a été très bien accueillie par l’opinion publique iranienne. La majorité des Iraniens espère désormais vivre un avenir meilleur. Mais ils savent cependant que le pays est aussi confronté à un autre problème encore plus grave que la question du nucléaire, un problème dont la responsabilité incombe presque exclusivement au pouvoir et qui malheureusement ne pourra pas être réglé par une négociation internationale.

L’Iran va vers une «grande catastrophe». Cette constatation n’est pas le fait d’opposants au régime de Téhéran, ni même celle d’analystes critiques de la politique iranienne tentés par l’utilisation de formules alarmistes. L’expression «grande catastrophe» (fajeh-e bozorg) a été utilisée par Issa Kalantari dans une interview accordée au quotidien iranien Shahrvand publié le lundi 27 avril 2015 à Téhéran. Issa Kalantari, ancien ministre de l’Agriculture dans le gouvernement Rafsandjani (1989-1997) ainsi que sous le premier mandat de Khatami (1997-2001), est aujourd’hui conseiller pour les questions relatives à l’eau, à l’agriculture et à l’environnement auprès du vice-président de la République islamique, tout en exerçant la fonction de secrétaire du comité chargé de la régénération du lac d’Orumiye.

Pour Kalantari, l’Iran s’achemine vers une catastrophe écologique sans précédent dans son histoire dont la principale raison est la raréfaction des ressources en eau du pays. Il n’hésite pas à dire que si les choses continuent à ce train, dans un avenir proche, 70% de la population totale de l’Iran, soit environ 50 millions d’habitants, sera contrainte de quitter le pays à cause de la pénurie d’eau. Parmi les formules chocs que Kalantari emploie, on notera: «Ce que nous faisons avec les nappes phréatiques de notre pays prépare à un génocide», ou «Nous n’avons pas su préserver l’héritage de 7000 ans de civilisation qui nous a été confié». Il avance aussi des chiffres effrayants. Ainsi, la plupart des rivières et cours d’eau du pays sont pratiquement asséchés. Selon Kalantari, deux pays au monde détiennent le record de l’utilisation excessive de leurs réserves d’eau de surface: l’Egypte et l’Iran. Cependant, l’Egypte n’utilise que 46% de ses eaux alors que l’Iran atteint 97%. De plus, le lac Orumiye, le plus vaste du pays et le deuxième lac salé du monde, est à sec, comme la quasi-totalité des autres lacs iraniens situés au sud et à l’est du pays.

A l’origine de cette situation, le réchauffement climatique et le doublement du nombre des habitants du pays depuis la Révolution islamique. Mais ces deux raisons n’auraient jamais conduit le pays au bord de la situation catastrophique où il se trouve aujourd’hui si l’Etat avait appliqué une politique raisonnable fondée sur des critères scientifiques et des techniques de l’usage parcimonieux de l’eau, méthodes connues des Iraniens depuis des millénaires. La mauvaise gestion de l’économie du pays en général et plus particulièrement du secteur agricole, ainsi que l’interférence des considérations idéologiques dans les prises de décision en matière de développement, sont les facteurs qui ont fortement contribué à l’état actuel dans lequel se trouve l’Iran. En d’autres termes, la crise de l’eau en Iran a des dimensions politiques évidentes.

Les dix premières années de l’histoire de la République islamique, les années Khomeyni, ont été marquées par l’agitation révolutionnaire, la prise en otage des diplomates américains ainsi que la guerre Iran-Irak (1980-1988). Durant cette décennie, l’Iran a surtout connu une économie de guerre, destinée à soutenir l’effort militaire et à répondre aux besoins vitaux de la population, ainsi que la nationalisation des secteurs industriels et bancaires.

La fin de la guerre et la présidence Rafsandjani (1989-1997) correspondent au lancement d’un programme de reconstruction nationale. Cette politique ambitieuse menée tambour battant, sans concertation avec les responsables concernés, donne un peu d’air à l’économie du pays tout en contribuant à la montée de l’inflation qui désormais s’installe durablement. Par ailleurs, Rafsandjani lance aussi un programme de construction de barrages et de digues à grande vitesse, sans études préalables et sans en mesurer les conséquences sur l’environnement. De même, il ne prend pas du tout en compte la question de l’évaporation de l’eau retenue dans un pays à climat continental.

Les responsables politiques de la République islamique semblent d’ailleurs totalement imperméables aux critiques formulées, déjà à l’époque, à propos des risques de la construction de trop nombreux barrages dans les pays du Sud. Parallèlement à la construction de barrages et de digues, on assiste aussi, dans un désordre total, avec ou sans autorisation, au forage de très nombreux puits à travers tout le pays, ce qui va contribuer à l’assèchement progressif des nappes phréatiques. Cette politique de surexploitation des ressources en eau, inaugurée par Rafsandjani, va se poursuivre sous la présidence Khatami (1997-2005) et atteindre son paroxysme avec Ahmadinejad (2005-2013).

Comment expliquer le déclenchement et l’évolution de cette politique qui, par à-coups successifs, va conduire le pays à la crise de l’eau et au désastre écologique que connaît l’Iran d’aujourd’hui?

Au départ, ce qui intéresse surtout les responsables politiques de la République islamique, c’est de montrer la capacité du régime à réaliser des projets de développement aussi bien et même mieux qu’à l’époque du régime précédent. En d’autres termes, il s’agit de minimiser l’importance de la politique développementaliste du Shah, qui fut, dans les années 1960-1970, un facteur de légitimation de son pouvoir.

A cet objectif s’ajoute une considération plus idéologique. Alors que durant le règne de Mohammad-Reza Shah, en sollicitant une expertise internationale et en collaboration avec des compagnies étrangères spécialisées dans la construction de barrages, le gouvernement avait construit quatorze barrages en trente-huit ans, la République islamique va construire plus de cinq cents barrages et digues en un quart de siècle. La grande majorité de ces projets sont exécutés par une société de travaux publics et d’ingénierie, le Khatam al-Anbia, contrôlée par le Corps des gardiens de la révolution. Ainsi le développement économique et la construction des barrages sont passés aux mains de l’organe chargé de la sécurité du régime. Plus question d’expertise externe, plus question d’offre d’adjudication publique et surtout plus question d’analyse scientifique et d’évaluation des conséquences écologiques des grands travaux.

Dans le sillage de cette manière de faire se développe une rhétorique nationaliste et populiste. Les déclarations des dirigeants iraniens sont de plus en plus émaillées de phrases comme: «Nous n’avons pas besoin de l’apport des étrangers» ou «Nous sommes parfaitement capables de réaliser les projets de grande envergure par nos propres moyens». Quand certains économistes essaient d’attirer l’attention des responsables sur l’importance du respect des principes de base du développement durable dans la réalisation de leurs objectifs, ils sont accusés d’être influencés par des idées d’origine occidentale qui n’ont plus de raison d’être dans un Etat révolutionnaire. L’utilisation de ce discours nationaliste a aussi pour objectif de rassurer la population dans le contexte de l’isolement international dans lequel se trouve le pays depuis bien longtemps. Il s’agit même de valoriser les contraintes imposées par les Etats étrangers, qui en fin de compte renforcent l’indépendance nationale.

La question de l’indépendance nationale va tout naturellement être à l’origine du thème de l’autosuffisance alimentaire. Afin de mettre en place un tel projet, il fallait évidemment augmenter la superficie des terres cultivables et subvenir à leurs besoins en eau. Barrages et digues vont servir à détourner l’eau vers les nouvelles zones agricoles. De nombreux puits vont être forés sans autorisation, ce qui va épuiser les nappes phréatiques. Cette politique sera un échec. Non seulement l’autosuffisance alimentaire s’avère impossible à réaliser pour une population de 80 millions de personnes, mais de plus elle est à l’origine de nouvelles tensions sociales qui prennent rapidement des dimensions de contestations régionalistes mettant en cause la sécurité interne de l’Etat. Les cultivateurs de la province d’Ispahan, les habitants du Khouzistan ou du pourtour du lac Orumiye et bien d’autres régions ont l’impression que l’on «vole» leurs rivières et leurs réserves souterraines pour les diriger vers des régions où les notables du régime et les «institutions révolutionnaires» comme les pasdarans ont des intérêts particuliers. Diminuer la dépendance alimentaire de l’Iran ne peut se faire que par une diminution drastique de l’eau utilisée par l’agriculture, actuellement de l’ordre de 92% des ressources du pays, dont 70% est gaspillée, et par la limitation de la production agricole essentiellement à des denrées à faible consommation d’eau.

Cerise sur le gâteau, conséquence de plusieurs tranches superposées de décisions politiques malencontreuses au cours de l’été 2012, au moment où la crise de l’eau devient de plus en plus alarmante, le guide suprême Ali Khamenei décide l’abandon de la politique de contrôle des naissances en vigueur depuis 1989, et opte pour une politique nataliste dont l’objectif devrait être une population de 150 millions d’habitants! Certes, pour des raisons sociales et économiques, le doute plane sur la réussite d’un tel projet, mais il est révélateur de l’inconscience de la situation réelle du pays au sein des sphères dirigeantes du régime.

«Nous n’avons pas su préserver l’héritage de 7000 ans de civilisation qui nous a été confié», dit Issa Kalantari

Plus de 500 barrages et digues ont été construits en 25 ans, sans expertise externe, sans considération environnementale.

Source : Le Temps, 30 août 2015

La reprise des circuits de financement est nécessaire pour favoriser l'investissement des entreprises françaises en Iran

Après l'amende record infligée à BNP Paribas, les banques françaises ne sont pas pressées de revenir en Iran. La reprise des circuits de financement est pourtant fondamentale pour les entreprises françaises. 


Depuis la levée officielle des sanctions européennes contre l’Iran le 16 janvier 2016, c’est le dernier obstacle de taille pour les entreprises françaises avides de reprendre leurs affaires avec Téhéran. La question du financement freine le retour des industriels tricolores en Iran. Avec la levée de l’embargo, les banques iraniennes vont accéder à nouveau dans les prochains jours au circuit bancaire international, grâce à la reprise des accords swift.

En revanche, les banques françaises sont encore réticentes à prêter à nouveau et à s’investir sur le marché iranien. Traumatisés par l’amende record infligée à BNP Paris en 2014 par les autorités américaines, les établissements bancaires préfèrent attendre. D’autant que contrairement à certaines banques régionales allemandes qui ne sont pas exposées au dollar, la plupart des grandes banques françaises ont des filiales aux Etats-Unis. "Aucun des cas de pénalités qui ont fait les gros titres n’ont impliqué l’arsenal de sanctions en train d’être levées", confirme un avocat américain, qui appelle à la prudence alors qu’une partie des sanctions américaines est encore maintenue.


"CE N'EST QU'UNE QUESTION DE MOIS"

Les Iraniens, qui manquent d’investissements, en font une priorité. Lors de sa visite officielle en France, le président iranien Hassan Rohani a rappelé l’importance de "la mise en place de garanties financières pour débloquer ces relations commerciales, alors que la concurrence est importante. Cette clef est entre vos mains""Les banques doivent reprendre leurs opérations pour faciliter le commerce courant", renchérit Majid Zamani, le Pdg de Kardan investment Bank présent dans la délégation iranienne, venu pour rencontrer des établissements français. Mais ses rencontres avec plusieurs banques d’investissement de la place lui laissent un goût amer. "Ils veulent bien faire des prestations de conseil mais rien de plus. Les groupes et les banques françaises ne veulent faire que de l’export, nous nous avons besoin qu’elles investissent", regrette le banquier.

Malgré leur empressement à conclure des contrats, les entreprises françaises doivent composer avec. Le groupe Fives a signé un accord cadre pour la fourniture d’équipements à une usine  d’aluminium primaire du groupe Imidro, pour 100 millions d’euros. Quasi achevé, le contrat est pour l’instant conditionné à la mise en place de moyens de financement. D’autres pourraient suivre pour un total de 400 millions d’euros. "Il faut être progressif et se conformer au rythme de levée des sanctions. Les banques vont prendre toutes les précautions mais ce n’est qu’une question de quelques mois", estime Frédéric Sanchez, le Pdg de Fives, dont le groupe réalisait, avant l’embargo, entre 150 et 200 millions d’euros de chiffre d'affaires annuel dans le pays.

La situation devrait s’améliorer rapidement. L’assureur-crédit Coface doit annoncer aujourd’hui la réouverture de ses prises en garanties publiques pour les crédits acheteurs en Iran. De quoi permettre de reprendre le commerce courant et assurer le financement d’une partie des grands contrats annoncés, d’autant que l’enveloppe devrait être significative.


DES BANQUES CHINOISES À L'AFFÛT

D’autres entreprises ont préféré contourner la difficulté, en passant par Dubaï, devenu le hub financier pour l’Iran depuis l’embargo. L’ETI de forge et estampage Manoir industrie a déjà signé une lettre d’intention avec un partenaire iranien pour fabriquer des pièces destinées à la pétrochimie, sans se soucier du financement. "Nous nous appuierons sur les banques chinoises, bien moins frileuses. Pour nous, l’Iran est un marché majeur", assure Eric Le Gouvello, le directeur général de Manoir industries, racheté par le groupe chinois Taihai il y a quelques années. Pour se faire payer de sa première commande décrochée il y a quelques semaines, une autre PME a facturé celle-ci au bureau de représentation en Alleagne de son client iranien. 

Mais à moyen terme, la frilosité des banques françaises pourrait pénaliser les entreprises dans leur conquête. En Italie, où le président Hassan Rohani s’est arrêté avant d’arriver en France, "deux banques italiennes ont décidé de reprendre leurs lignes de crédit avec l’Iran", souligne Majid Zamani.  L’assureur-crédit italien Sace a aussi repris ses garanties publiques vers Téhéran. "Comparé à l’Italie, les Français sont en train de prendre du retard", estime le banquier iranien.

Source : L'Usine nouvelle, 28 janvier 2016

mardi, janvier 26, 2016

Les effets de l'ouverture du marché iranien

Dans une étude intitulée « Iran : Back in the game ? », les économistes de l’assureur crédit allemand Euler Hermes ont mesuré les effets de l’ouverture de ce marché de près de 80 millions d’habitants : l’économie iranienne devrait y gagner en investissements et en croissance, et les industriels européens devraient en être les grands bénéficiaires.


+ 4 %

C’est la croissance attendue de l’économie iranienne cette année. Après + 2 % en 2015. En 2017, le PIB pourrait progresser de 4,2 %.


+ 20 %

C’est la hausse attendue des exportations et des importations iraniennes en 2016. En 2017, elles devraient progresser respectivement de 11 % et 13 %. En deux ans, le volume d’importations supplémentaires en Iran pourrait atteindre 20 milliards de dollars (dont 4 milliards en machines et matériel industriel, 2,7 milliards en voitures).


2 milliards d’euros

C’est le surcroît d’exportations vers l’Iran, sur la période 2015-2017, dont devrait bénéficier notamment l’Allemagne, qui serait ainsi le premier bénéficiaire de l’ouverture iranienne. Elle serait suivie par la France (1,3 milliard de plus d’exportations vers l’Iran), l’Italie (+ 900 millions) et le Royaume-Uni (+ 600 millions). Les Etats-Unis, qui ne comptent que pour 1 % dans les importations iraniennes, verraient leurs exportations vers Téhéran quintupler à 500 millions de dollars.


dimanche, janvier 17, 2016

Caviar, pétrole, voitures... Ce que la levée des sanctions contre l'Iran va changer...

A la suite de la signature de l'accord entre les grandes puissances et Téhéran, les Etats-Unis vont mettre fin à des sanctions économiques.

Les Etats-Unis ont levé, samedi 16 janvier, leurs sanctions contre l'Iran, liées à son programme nucléaire, à la suite de l'entrée en vigueur de l'accord conclu par les grandes puissances et Téhéran, censé garantir que la République islamique n'ait jamais la bombe atomique.

Mais resteront en vigueur des mesures punitives que Washington a prises contre l'Iran accusé d'être un "Etat soutenant le terrorisme" et de conduire un programme de missiles balistiques.

Voici un aperçu des sanctions rayées de la législation américaine et qui doivent permettre de donner de l'air à l'économie iranienne asphyxiée par les mesures imposées par Washington, l'Union européenne et l'ONU.

50 milliards

La fin des sanctions américaines liées au nucléaire va se concrétiser en monnaie sonnante et trébuchante : l'Iran devrait pouvoir toucher des dizaines de milliards de dollars de ses recettes pétrolières, actuellement bloquées dans des banques étrangères. Des responsables américains pensent que la manne s'élève à 50 milliards de dollars, une fois les dettes et autres factures réglées par Téhéran.

Avions et caviar

La levée des sanctions ne signifie pas que les entreprises américaines pourront tout d'un coup commercer librement avec l'Iran. 

Mais trois secteurs devraient s'ouvrir aux Américains :

  • Des entreprises pourront vendre des avions commerciaux et des pièces détachées à la flotte aéronautique vieillissante iranienne, à condition qu'ils ne servent pas au transport militaire ou à toute activité interdite par l'accord sur le nucléaire.
  • Des entreprises américaines basées à l'étranger pourront commercer avec l'Iran.
  • Des producteurs iraniens pourront à leur tour exporter vers les Etats-Unis, qu'il s'agisse de tapis ou d'alimentation comme du caviar ou des pistaches.

400 personnes

Au total, Washington a rayé de ses listes noires 400 noms de personnes physiques et morales - individus, entreprises, entités - qui étaient accusées d'avoir enfreint la législation sur les sanctions américaines liées au programme nucléaire iranien.

Sanctions secondaires

C'est l'un des aspects méconnus des sanctions américaines car elles visaient des étrangers, des non-américains, interdits de mener des transactions avec les Iraniens. Ces sanctions dites "secondaires" disparaissent dans les secteurs suivants :

  • Secteurs bancaire et financier, y compris lors de transactions avec la banque centrale iranienne.
  • Secteur des assurances.
  • Secteurs pétrolier, gazier et pétrochimique.
  • Secteurs portuaire et du transport maritime.
  • Commerce de l'or et autres métaux précieux.
  • Secteurs de l'aluminium, de l'acier, du charbon et de l'informatique, à condition qu'il ne s'agisse pas de recherche en matière nucléaire interdite par l'accord de Vienne.
  • Secteur automobile
  • Tous les sous-traitants liés aux activités listées ci-dessus.
Source : L'Obs du 17 janvier 2016