jeudi, juin 16, 2005

Les Moudjahidines du peuple iraniens accusés de tortures

Les Moudjahidines du peuple iraniens accusés de tortures
Article paru dans Le Monde, édition du 29.05.05

L'ORGANISATION des Moudjahidines du peuple iranienne ou Moudjahidine Khalq (MKO) se présente comme l'alternative démocratique au gouvernement iranien. Mais à en juger d'après un rapport que vient de publier l'organisation de défense des droits de l'homme Human Rights Watch (HRW), les règles qui prévalent au sein de ce mouvement armé d'opposition au pouvoir iranien sont aux antipodes de la démocratie et du respect des libertés. Les abus qui y sont commis vont de « la détention et de la persécution à de longues périodes de détention en isolement, aux coups sévères et à la torture », en passant par « les violences verbales et psychologiques, les aveux forcés, les menaces de liquidation ».

Créé en 1965, sous le régime du chah, le MKO a participé à la révolution qui a renversé le pouvoir impérial, avant d'entrer, au début des années 1980, dans l'opposition armée au nouveau régime iranien. Après s'être exilés à Paris à l'été 1981, les dirigeants du MKO ont, à la demande des autorités françaises, été forcés en 1986 de quitter la France et se sont repliés sur l'Irak, où ils ont établi leurs quartiers généraux, des camps et des bases d'entraînement. HRW a recueilli séparément les témoignages de douze dissidents du MKO actuellement réfugiés en Europe. Leurs récits sont édifiants.

Au nom de la « révolution idéologique » lancée par le couple dirigeant de l'organisation, Massoud et Maryam Radjavi, les membres étaient soumis à des règles plus proches du fonctionnement d'une secte que d'une formation politique : ils furent appelés à « se détacher de tout lien physique et sentimental », conjugal ou autre, « afin d'augmenter leur «capacité de lutte˜ ».

Massoud Radjavi s'étant proclamé compagnon de l'imam Zaman - le douzième imam descendant du prophète entré en « occultation » au cours du XXe siècle et dont les chiites duodécimains attendent le retour -, les membres du MKO devaient « dissiper la zone tampon qui les séparait de lui et qui tient à leur faiblesse », étant entendu que la « zone tampon » la plus proche est l'épouse, selon le témoignage d'un ancien dirigeant du MKO, Massoud Banisadr.

« LES OS BRISÉS »

Accusés de trahison et d'espionnage au profit du gouvernement iranien pour avoir exprimé le désir de quitter le MKO, certains membres ont « disparu » sous le prétexte d'avoir été envoyés en opération de commando en Iran, alors qu'ils avaient été arrêtés et emprisonnés dans trois types de centres pénitentiaires, où la maltraitance et les abus étaient la règle.

Ce ne sont là que quelques exemples de comportement parmi les extraits des verbatims des témoignages des dissidents interrogés. Trois d'entre eux ont été témoins du décès de deux de leurs camarades. « La porte de la prison s'est ouverte et le prisonnier fut jeté dans la cellule. Il est tombé face contre terre. Au début, nous ne l'avons pas reconnu. Il avait été sévèrement frappé. Nous l'avons retourné. C'était Parviz Ahmadi, qui avait été conduit pour interrogatoire quelques heures auparavant. Il avait les os brisés, les jambes couvertes de plaies. Il a sombré dans le coma. Nous avons essayé de l'aider, mais au bout d'une dizaine de minutes il décédait », raconte Abbas Sadeghinezhad, dont le témoignage est corroboré, indique HRW, par celui d'Alireza Mir Asgari, qui partageait la même cellule.

Mouna Naïm

mercredi, juin 15, 2005

L'Iran signe un accord avec l'Inde pour lui fournir du gaz pendant 25 ans

L'Iran et l'Inde ont signé lundi 13 juin à Téhéran un accord de 22 milliards de dollars pour la livraison annuelle de 5 millions de tonnes de gaz naturel liquéfié (GNL) par Téhéran à New Delhi.


"Nous sommes tombés d'accord sur le prix du GNL. Les exportations commenceront fin 2009 et atteindront rapidement le niveau de cinq millions de tonnes par an", a déclaré à la presse le ministre du pétrole iranien, Bijan Namdar Zanganeh, après la signature de l'accord avec son homologue indien, Mani Shankar Aiyar.

Le contrat a été signé pour une durée de 25 ans entre la compagnie iranienne National Iranian Gas Export Company et les sociétés indiennes Indian Oil Company (IOC), Gail, et Baharat India. Le gaz sera exporté par voie maritime.

M. Namdar Zanganeh a également annoncé que des discussions se poursuivraient entre les deux pays pour attribuer à l'Inde l'exploitation du gisement pétrolier de Jofeir (30 000 barils par jour) et 10 % de celui de Yadavaran, tous deux situés dans le sud-ouest du pays.

"Si l'Inde accepte d'augmenter ses importations de GNL de 2,5 millions de tonnes supplémentaires, sa part dans le champ de Yadavaran passera à 20 %", a-t-il ajouté. Les deux pays sont en désaccord sur le prix de ces 2,5 Mt supplémentaires annuels.

New Delhi et Téhéran ont par ailleurs signé un mémorandum de coopération pour la construction d'un gazoduc entre l'Iran et l'Inde via le Pakistan. Ce document fixe le cadre des discussions entre les parties en vue d'arrêter entre autres le volume de gaz devant transiter par cette voie et la date du démarrage effectif du projet.

Le ministre du pétrole indien était au Pakistan avant l'Iran pour discuter de la construction de ce gazoduc, dont le coût est évalué à plus de 4 milliards de dollars.

Le projet prévoit la construction d'un gazoduc long de 2 775 km pour acheminer du gaz iranien depuis les gisements de Pars-Sud dans le sud du pays jusqu'à la frontière ouest de l'Inde.

Les Etats-Unis, qui se rapprochent de l'Inde et veulent l'aider à devenir une "puissance majeure du XXIe siècle", ont rappelé en mars leur hostilité au projet indien d'achat de gaz iranien. Washington a placé l'Iran sous embargo économique quasi total et estime que tout commerce avec ce pays l'encourage à soutenir le terrorisme international ou à chercher à accéder à l'arme nucléaire.


LEMONDE.FR : Article publié le 13.06.05

mardi, juin 07, 2005

Total voit l'Iran comme débouché pour le brut kazakh

LONDRES, 6 juin (Reuters) - Total < TOTAL > estime que l'Iran reste une route d'exportation prometteuse pour au moins une partie du brut extrait du gisement de Kashagan, au Kazakhstan, en dépit de l'opposition américaine à Téhéran, estime le vice-président de Total pour la Caspienne.

Total, actionnaire de Kashagan, s'est engagé sur cette route iranienne il y a cinq ans mais le projet a semblé voué à l'échec devant la progression de l'oléoduc BTC (Bakou-Tbilissi-Ceyhan en Turquie), soutenu par les Etats-Unis, et dans lequel le groupe pétrolier français a également acheté une participation.

Jean-Michel Salvadori a toutefois jugé, dans une interview à Reuters, que même si le Kazakhstan a promis pour BTC 30 millions de tonnes du brut de Kashagan, une route iranienne reste réalisable et sans doute même nécessaire.

"Nous croyons beaucoup à la route iranienne, nous pensons qu'elle a le potentiel pour devenir un débouché économique solide pour le brut de Kashagan", a-t-il dit. "Nous pensons qu'il faudra plusieurs options pour des questions variées, de concurrence comme de sécurité."

"On ne veut pas mettre tous nos oeufs dans le même panier", a-t-il ajouté lors d'une conférence à Paris sur le pétrole la semaine dernière.

Kashagan était, à l'époque de sa découverte en 1999, le plus vaste gisement offshore au monde depuis 30 ans.

Sa mise au jour a intensifié la concurrence entre l'Iran, la Russie et les Etats-Unis qui se disputaient déjà le contrôle des routes d'exportation du bassin de la Caspienne vers les marchés mondiaux.


DEVELOPPER L'INVESTISSEMENT

Washington, dans sa volonté de contourner la Russie et l'Iran, a soutenu la création de l'oléoduc BTC, inauguré le mois dernier. Initialement destiné au transport du pétrole d'Azerbaïdjan, cette route fonde aussi de solides espoirs sur le brut du Kazakhstan.

Le Kazakhstan espère que Kashagan lui permettra de tripler ses exportations pétrolières d'ici 2015 à plus de trois millions de barils par jour.

Selon Salvadori, les volumes de Kashagan s'annoncent tellement élevés qu'il faudra trouver encore de nouvelles routes d'exportation. En dépit de l'hostilité de Washington, de nombreux dirigeants du secteur pétrolier privilégient l'Iran dans cette optique, puisqu'elle exporte vers le Golfe. L'option russe entraînerait une hausse du transit vers le détroit du Bosphore, qui est déjà saturé.

"Nous ne voulons pas placer toute notre part (de production) dans une seule direction," a déclaré Salvadori.

Outre sa part de 18,5% dans Kashagan, Total espère aussi participer à d'autres projets sur la Caspienne comme le gisement de Kurmangazy, dont les réserves sont évaluées à un milliard de tonnes de pétrole, et qui sera développé conjointement par la Russie et le Kazakhstan.

Salvadori a déclaré que les discussions se déroulaient à propos de l'entrée de Total sur ce gisement, qui a déjà été retardée à plusieurs reprises. Total va continuer à développer des projets d'investissement sur la Caspienne, identifiée par le groupe comme l'une de ses grandes zones de croissance future.

Salvadori a toutefois souligné que la question de la diversité des routes d'acheminement devait être réglée car le problème des transports dans cette région enclavée est tout aussi important que le développement de la production.

"Il y a un pays dont la production va tripler dans les dix prochaines années. Cette région sera donc très importante pour Total en termes de base d'actifs", a-t-il dit.

"Nous avons déjà investi et nous souhaitons investir davantage dans cette partie du monde. Mais dans la Caspienne, on ne peut pas dissocier l'investissement dans l'exploration et la production de l'investissement dans la logistique et le transport."


par Sujata Rao

lundi, juin 06, 2005

L'OMC décide d'ouvrir des négociations d'adhésion avec l'Iran

LEMONDE.FR : Article publié le 26.05.05



Les 148 pays membres de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ont décidé d'ouvrir, jeudi, des négociations d'adhésion avec l'Iran, les Etats-Unis ayant décidé de lever leur veto, a annoncé l'ambassadeur d'Iran auprès des Nations unies à Genève, Mohamed Reza Alborzi. Ce dernier était l'invité d'une réunion à huis clos du conseil général de l'OMC, dont les Etats membres prennent leurs décisions par consensus.



L'Iran, accusé par Washington de chercher à se doter d'armes atomiques, a accepté, mercredi, de prolonger le gel de toutes ses activités nucléaires dans le cadre d'un accord avec l'Union européenne. Téhéran avait déposé sa candidature d'adhésion à l'OMC en septembre 1996. Son dossier avait été étudié pour la première fois en mai 2001, mais les Etats-Unis avaient jusqu'ici opposé leur veto à toute ouverture de discussions.


L'ADHÉSION DE TÉHÉRAN APPROUVÉE À L'UNANIMITÉ

Les pays membres, réunis en conseil général, ont approuvé à l'unanimité l'adhésion de Téhéran, candidat à l'OMC depuis 1996 mais dont la candidature se heurtait systématiquement ces dernières années à l'opposition de Washington.

Cette fois, les Etats-Unis n'ont pas soulevé d'objection à la candidature iranienne. "Nous n'allons pas la bloquer afin de soutenir la diplomatie de nos amis européens (...)", a déclaré à Reuters un haut responsable de l'administration américaine ayant requis l'anonymat. L'évolution de la position des Etats-Unis peut paraître surprenante alors qu'une loi américaine (loi d'Amato), votée en 1996, prévoit des sanctions unilatérales contre toute entreprise qui investirait plus de 40 millions de dollars en une année dans le secteur des hydrocarbures en Iran ou en Libye. Total, en 1997, avait failli tomber sous le coup de cette loi pour un important contrat gazier signé avec l'Iran. La loi d'Amato n'a cependant jamais été appliquée.

ACCORD DE "LA DERNIÈRE CHANCE"


L'ouverture des négociations avec l'Iran survient au lendemain d'une réunion ministérielle sur le dossier nucléaire iranien. Cette réunion entre Européens et Iraniens a abouti à un compromis qui laisse pour l'instant en vigueur un accord prévoyant que l'Iran continuera de suspendre ses activités nucléaires les plus sensibles.

L'UE et l'Iran se sont offert, mercredi, deux mois supplémentaires pour parvenir à un accord sur le programme nucléaire de la République islamique. L'accord conclu aux termes de négociations menées à Genève, et qualifiées de "la dernière chance", implique que Téhéran s'en tienne au gel de ses activités nucléaires sensibles.