dimanche, décembre 10, 2017

Investir en iran ?


En juillet 2015, l'Iran a conclu à Vienne avec les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU et l'Allemagne un accord de résolution du conflit sur le programme nucléaire de Téhéran. L'accord, connu sous le nom de Plan d'action global commun (PAGC), a imposé de strictes limites aux activités nucléaires de l'Iran en échange de la levée des sanctions économiques imposées depuis 2010, qui avaient paralysé l'économie iranienne et éprouvé le peuple iranien. Téhéran a ainsi mis en œuvre ses engagements au cours de l'automne 2015 et en janvier 2016, les sanctions ont été levées. Au cours des mois qui ont suivi, de nombreux représentants de sociétés étrangères ont fait le voyage à Téhéran pour étudier une reprise de leurs activités ou une possible entrée dans le pays.
Avec un PIB de 415 milliards de dollars en 2016, l'Iran se classe au 20e rang mondial. À bien des égards, le pays est un marché très attractif parce qu'à fort potentiel. L'Iran compte une population de 80 millions de personnes, dont 70 % sont âgés de moins de 35 ans. Cette population jeune, dynamique, bien éduquée, cherche des produits, des interactions et des opportunités d'échange avec les étrangers. Le pays dispose d'une infrastructure moderne et d'une économie raisonnablement diversifiée. L'Iran, c'est la deuxième plus grande réserve de gaz naturel au monde, la 4e plus grande réserve de pétrole brut et le 12e marché automobile. Les perspectives d'investissement sont prometteuses.
Depuis son arrivée en 2013, le président iranien Hassan Rohani a cherché à stabiliser les conditions intérieures. L'inflation a été réduite de plus de 40 % en 2013 à un peu moins de 10 % depuis 2016, alors que l'économie a recommencé à croître depuis 2014, atteignant une croissance de 4,6 % en 2016. Il a aussi cherché à mettre fin à l'isolement de l'Iran. Le processus de normalisation a été renforcé par la visite de Rohani en France et en Italie au début de 2016. Il a signé des contrats conséquents dont un à plus de 18 milliards de dollars pour la vente de 118 avions Airbus (une opération semblable d'une valeur de 16 milliards de dollars pour l'achat de 80 avions Boeing a également été conclue simultanément). Avec la fin des sanctions, l'Iran a pu augmenter ses exportations de pétrole de 25 %, atteignant 3,7 millions de barils par jours (un niveau similaire à celui de 2011) et générer des revenus de 44,2 milliards de dollars. Les réserves de change internationales de l'Iran dépassent maintenant les 135 milliards de dollars. Rohani vise une croissance du PIB de 8 % par an et veut attirer 50 milliards de dollars d'investissements étrangers.

La République islamique d'Iran accueille favorablement les investisseurs étrangers, à conditions qu'ils soient détenteur d'une licence. Pour obtenir ce précieux sésame, il faut remplir un formulaire que l'on peut se procurer sur le site suivant : www.oietai.ir. Le dépôt de candidature doit être rédigé en anglais. Si le demandeur est un Iranien expatrié ou est originaire du Tadjikistan ou de l'Afghanistan, cette demande peut être rédigée en langue persane.
Une fois sa licence délivrée, l'investisseur étranger doit transférer dans un délai de six mois une partie ou l'ensemble des capitaux qu'il envisage d'investir. En cas de non-respect de ce délai, il pourrait se voir retirer sa licence. S'il souhaite prolonger la durée de validité de cette dernière, il est tenu d'expliquer à l'organisme en charge de la gestion des investissements étrangers le pourquoi de son retard. Rappelons que pour bénéficier des avantages inhérents à la loi régissant les investissements étrangers il doit dès le dépôt de sa demande de licence, déclarer précisément les montants en cash et en nature (machines et pièces d'équipement, matières premières, savoir-faire technique, et tout autre forme de propriété intellectuelle) qu'il souhaite investir (Article 11 de la LAIPVP et l'article 24 du statut).
Parmi les nombreux domaines où les capitaux étrangers sont acceptés on trouve l'agriculture, les transports, les télécommunications, les services, l'eau, le gaz l'électricité et l'énergie. Les étrangers qui investissent dans ces secteurs peuvent bénéficier de fortes exonérations fiscales.
Un investisseur étranger peut également entrer dans le capital d'une société iranienne sous réserve que son investissement crée de la valeur ajoutée. Les investissements sous forme de prêts sont aussi acceptés à condition bien entendu que l'emprunteur local peut garantir le remboursement des sommes reçues.
En Iran les investisseurs étrangers jouissent des mêmes droits que les investisseurs locaux (article 8 de la LAIPVP). Ils peuvent, acquérir des terres s'ils sont détenteur d'une société enregistrée en Iran, investir à 100% dans un projet et faire appel à un arbitrage international en cas de différents. S'ils décident de céder tout ou partie de son capital à d'autres investisseurs étrangers, ils doivent obtenir l'aval du conseil d'administration ainsi que celui des autorités iraniennes (article 10 de la LAIPVP).
En cas d'expropriation, de nationalisation, cette même loi leur garantie la possibilité d'obtenir des compensations de la part du gouvernement Iranien (article 9 de la LAIPVP). Par contre, pour faire auditer leurs comptes annuels ils doivent obligatoirement avoir recours à un cabinet d'audit agréés par l'Association des contrôleurs légaux des comptes d'Iran (articles 22-23 du statut). Les investisseurs étrangers, leurs collaborateurs ainsi que les membres de leur famille se verront délivrer un visa de trois ans renouvelable afin de séjourner en Iran. Ils peuvent rapatrier les bénéfices, les capitaux et intérêts générés par leur investissement s'ils obtiennent l'accord de l'administration Iranienne. Toute demande de rapatriement doit être accompagnée d'un rapport d'audit.

Bien qu'il y ait certainement des signes prometteurs et des opportunités potentielles, il existe aussi un certain nombre d'incertitudes et de faiblesses qui pourraient compliquer un redressement économique et entraver l'investissement étranger et le commerce avec Téhéran. L'Iran est confronté à un déficit budgétaire important de plus de 9 milliards de dollars (équivalent à 2,5 % du PIB) en 2016-2017, alors que sa dette extérieure s'établit à 8,2 milliards de dollars. Les déficits budgétaires du gouvernement peuvent être largement attribués à la baisse des prix du pétrole et des recettes fiscales. De nombreuses entreprises étrangères sont prudentes en raison de l'incertitude créée par l'élection de Donald Trump et des sanctions américaines pesant sur les sociétés de pays tiers qui travaillent avec l'Iran. Beaucoup craignent de violer les sanctions américaines et d'être pénalisées. De plus, l'obtention de financements et d'assurances pour les activités commerciales en Iran peut être problématique. Dans le secteur du pétrole et du gaz, bien que de nombreuses entreprises étrangères aient signé des protocoles d'entente avec l'Iran, aucune entreprise majeure n'a encore conclu un accord réel. Le géant français du pétrole Total a déclaré que son investissement en Iran dépend du respect par les États-Unis du PAGC. Après des années de sous-investissement, le ministre iranien du pétrole, Zanganeh, a admis que l'Iran avait besoin d'un investissement de 100 milliards de dollars dans le secteur du pétrole et du gaz pour relancer ses industries d'hydrocarbures. Avec la peur d'éventuelles sanctions américaines, les entreprises étrangères ne peuvent pas utiliser le dollar américain dans leurs relations avec l'Iran. D'autres obstacles aux relations commerciales avec Iran tiennent à la fréquence des changements dans la réglementation locale et à la corruption qui devient un problème majeur.
Source : Monde économique