jeudi, mars 16, 2006

Le Japon commence à réduire ses importations de pétrole iranien

TOKYO (AFP) - Le plus gros raffineur du Japon, Nippon Oil (Berlin: NIO.BE - actualité) , va réduire de plus de 15% ses importations de pétrole en provenance d'Iran, afin de se mettre à l'abri au cas où l'actuelle crise nucléaire perturberait l'approvisionnement.

Nippon Oil a décidé de ne plus importer que 120.000 barils de brut iranien par jour, contre 142.000 auparavant. Il comblera la différence en important plus de pétrole saoudien et koweïtien.

Client numéro un du pétrole iranien, le Japon est le premier pays à réduire son exposition depuis l'arrivée au pouvoir du président Mahmoud Ahmadinejad en août dernier et le début de la crise nucléaire.

"Le Japon est un des pays les plus conservateurs pour tout ce qui touche à la question de l'approvisionnement de ses raffineries", a expliqué Tony Numan, spécialiste du risque énergétique chez Mitsubishi Corporation (MBC.IL - actualité) .

"Avec l'Iran, la crainte est que l'approvisionnement pourrait connaître des problèmes en cas de sanctions imposées par les Nations unies ou de représailles décidées par l'Iran", a-t-il ajouté.

Interrogé par l'AFP, un porte-parole de Nippon Oil a minimisé cette réduction, assurant qu'elle n'affecterait que les achats de pétrole effectués par le biais de courtiers sur les marchés internationaux, et non les contrats d'approvisionnement direct souscrits entre Nippon Oil et l'Iran.

"Une raison majeure tient à ce qu'il y a eu des problèmes avec un précédent courtier" a déclaré le porte-parole.

"Le risque associé au programme nucléaire iranien a aussi été pris en compte quand nous avons changé de courtier", a-t-il toutefois ajouté.

D'autres grandes raffineries japonaises ont assuré qu'elles ne prévoyaient aucune mesure similaire.

L'Iran a déclenché une crise internationale majeure en janvier en annonçant la reprise de ses activités liées à l'enrichissement d'uranium. La communauté internationale l'accuse de vouloir fabriquer la bombe atomique, et le dossier est actuellement examiné par le Conseil de sécurité des Nations unies.

Cette crise embarrasse le Japon, deuxième économie mondiale, qui est fortement dépendant des importations pétrolières en provenance du Golfe.

L'Iran vend à l'Archipel un quart de ses exportations de brut. Il est le troisième fournisseur de pétrole du Japon avec 16% des importations nippones, derrière l'Arabie saoudite (29%) et les Emirats arabes unis (25%).

Tokyo a développé sa propre "diplomatie pétrolière" au Moyen-Orient (Munich: 864642 - actualité) , en particulier avec l'Iran, quitte à mécontenter son proche allié américain.

Ainsi, la compagnie semi-publique japonaise Inpex (Munich: A0DK0D - actualité) devrait bientôt commencer à développer l'immense champ pétrolier d'Azadegan (sud-ouest de l'Iran), malgré les pressions américaines.

En février 2004, au grand dam de Washington, Inpex avait signé un contrat de deux milliards de dollars en Iran, le plus important accord pétrolier jamais conclu par le Japon, pour développer Azadegan.

Selon Hidenobu Sato, un spécialiste de l'Iran à l'Institut de recherches japonais sur le Moyen-Orient, la décision de Nippon Oil pourrait alimenter la théorie iranienne selon laquelle les Etats-Unis conspirent contre Téhéran en faisant pression contre le Japon.

"D'un point de vue commercial, l'annonce n'aura strictement aucun effet ni pour le Japon ni pour l'Iran. L'Iran dispose de beaucoup d'options pour vendre son pétrole. Mais la façon dont ils peuvent entendre le message, c'est autre chose", a souligné M. Sato.

"L'Iran va interpréter ça comme un message politique négatif. Ils vont se demander pourquoi Tokyo n'a pas réussi à contrôler une entreprise de son pays et pourquoi il a laissé annoncer ce genre de choses", a-t-il prédit.

"Mais même si le Japon réduit ses importations en provenance d'Iran, l'Iran sait que la Chine est prête à acheter tout le pétrole qu'il peut produire", a noté M. Sato.

Aucun commentaire: