samedi, mars 25, 2006

Japon et Iran : ensemble pour le pétrole ... malgré les USA

Le Japon s'est dit jeudi déterminé à poursuivre sa coopération pétrolière avec l'Iran, indispensable à son économie, et ce malgré les pressions américaines qui s'accentuent de jour en jour selon la presse de Tokyo... l'oncle SAM voyant surtout d'un mauvais oeil des approvisionnements potentiels lui échapper ... Mais les pressions américaines sont susceptibles de susciter des frictions entre Tokyo et Washington, deux très proches alliés.

Le premier raffineur du Japon, Nippon Oil, a toutefois récemment annoncé son intention de réduire ses importations de pétrole indirectes en provenance d'Iran, estimant notamment que la crise actuelle fait peser des incertitudes sur l'approvisionnement.

1 – Les Etats-Unis font pression sur le Japon

Selon un quotidien japonais, les USA auraient pressé le Japon de renoncer à un énorme projet de développement pétrolier en Iran, de crainte que les bénéfices en découlant ne servent à financer le programme nucléaire iranien.

La demande américaine a été formulée officieusement par des hauts diplomates américains, dont le numéro deux du département d'Etat Robert Zoellick et le responsable du contrôle des armements Robert Joseph, précise le quotidien Sankei, citant des sources anonymes proches du gouvernement américain. Washington exige que Tokyo renonce au minimum à développer l'immense champ pétrolier d'Azagedan, au sud-ouest de l'Iran, que la compagnie semi-publique japonaise Inpex est sur le point d'entreprendre. En février 2004, au grand dam des Américains, Inpex avait signé un contrat de deux milliards de dollars en Iran, le plus important accord pétrolier jamais conclu.

Aucune demande officielle américaine n'est cependant parvenue au vice-ministre japonais du Commerce Hideji Sugiyama. Le Japon estime de ce fait devoir s'en tenir à sa politique actuelle. Il n'a engagé pour l'instant aucune discussion concrète avec les Etats-Unis sur le sujet, a assuré une porte-parole du ministère des Affaires étrangères, en réaction à l'article. De son côté, l'ambassade des Etats-Unis au Japon a réitéré l'opposition de principe de Washington à tout investissement en Iran, mais elle a refusé de se prononcer spécifiquement sur le projet d'Azadegan. "Le Japon connaît notre position sur cette question", s'est contenté de répondre un porte-parole de l'ambassade.

Le mois dernier, les autorités iraniennes ont assuré le gouvernement japonais qu'elles n'avaient nulle intention de revenir sur leurs engagements pétroliers avec le Japon en dépit de l'opposition déclarée de Tokyo au programme nucléaire iranien. Le gouvernement japonais a négocié de longs mois avec l’Iran et les discussions entamées en 2000 ont achoppé à plusieurs reprises, notamment fin 2003 quand les relations s’étaient tendues entre l’Iran et la communauté internationale qui exigeait de contrôler le programme nucléaire iranien.

2 – Potentiel du champs d'Azadegan

Le gisement, situé au nord-ouest du pays, est considéré comme le plus important d’Iran et le projet conjoint porte sur plus de 2 milliards de dollars. Les réserves sont estimées entre 35 et 45 milliards de barils, selon les Iraniens, mais les Japonais, restant plus prudents, tablent sur 26 milliards de barils de réserves. Même revues à la baisse, elles n'en sont pas moins les deuxièmes réserves les plus importantes au monde. La production devrait démarrer en 2007 par l’extraction de 50 000 barils par jour avant de passer à 150 000 barils par jour un an après et 260 000 barils par jour au maximum de la production. Le contrat est d’une durée de 12 ans et demi.

En février 2004, la compagnie semi-publique japonaise Inpex avait signé un contrat de deux milliards de dollars en Iran pour aménager et exploiter pendant 12 ans et demi le champ pétrolier d’Azadegan, dans le sud-ouest du pays, en faisant le plus important accord pétrolier jamais conclu par le Japon . Inpex et la National Iranian Oil Company détiennent respectivement 75% et 25% du projet. Mais compte tenu de l’importance du champ, en décembre 2005, Inpex avait souhaité s’associer Total, principal « client » du pétrole iranien (suivi par Shell, Statoil, Gazprom et la Malaisienne Petronas).

Le gouvernement japonais, principal actionnaire du groupe, hésite néanmoins jusqu’à présent à donner son accord pour le démarrage des travaux en raison de l’hostilité affichée par Washington. Mais Inpex craint de perdre ses droits sur le champ pétrolier s'il ne démarre pas le projet bientôt, plusieurs groupes Chinois et Européens étant également sur les rangs.

3 – Besoins énergétiques du Japon

Le Japon, pauvre en ressources énergétiques, importe la quasi-totalité de ses besoins en pétrole. Et, face à la montée en puissance de la Chine de plus en plus consommatrice en énergie au niveau mondial, Tokyo juge indispensable de diversifier ses fournisseurs afin de garantir son approvisionnement.

Le Japon occupe la première place sur le marché des exportations iraniennes avec 23 % de la part du marché (soit 6,9 milliards de $). Le Japon est également le 8e fournisseur de l’Iran avec plus de 1,3 milliards de $ par an ce qui représente 4% des importations iraniennes, mais le Japon est le premier client pétrolier de l’Iran et plus de 33% des importations de pétrole au Japon viennent de l’Iran.

Le développement du gisement d'Azagedan est donc un projet majeur pour le Japon en termes d'approvisionnement en énergie. Le pays, deuxième économie du monde, a développé sa propre "diplomatie pétrolière" au Moyen-Orient, en particulier avec l'Iran, quitte à mécontenter son proche allié américain. Tokyo s'estime très embarrassé par la crise nucléaire iranienne et espère que l'Iran prêtera une oreille attentive aux inquiétudes de la communauté internationale. La non-prolifération nucléaire et la nécessité d'un approvisionnement régulier en pétrole brut sont pour le Japon aussi cruciales l'une que l'autre.

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