jeudi, février 03, 2011

L’investissement en Iran : Un cadre général qui évolue vers une plus grande ouverture malgré des freins d'ordre politique


L’Iran est un important partenaire commercial de la France [lire +] mais les conditions politiques et économiques internes au pays rendent l’investissement très difficile [lire +]. L'Iran est ainsi loin d'attirer d'importants investissements étrangers du fait d'une part d'une législation encore trop restrictive, compte tenu notamment des procédures administratives lourdes imposées aux entreprises étrangères, et d'autre part, des facteurs politiques [lire +] qui freinent encore l'insertion de l'Iran dans l'économie internationale.
Depuis la Révolution islamique, l’embargo américain instauré en 1995, ainsi que la Loi d’Amato de novembre 1996, l’Iran se trouve très largement en marge des flux d’investissement étrangers. Le discours officiel a cependant évolué sous l’impulsion du Président Khatami et les autorités iraniennes cherchent maintenant à attirer les investissements étrangers sous leurs différentes formes (JV, BOT, etc.). Le décollage des IDE est en effet primordial pour le pays à un double titre : d’une part, le pays répondrait ainsi en partie au manque de financement interne, notamment dans le secteur pétrolier où le vieillissement des infrastructures limite la production, d’autre part, cela permettrait de desserrer la contrainte externe.
Les investissements directs étrangers (IDE) en Iran se heurtent à plusieurs obstacles, tant d'ordre interne (règles très restrictives, prépondérance de l'Etat dans l'économie, qu'il contrôle à hauteur de 85%) qu'externe (loi d'Amato interdisant, y compris pour les sociétés non-américaines, les investissements dans le secteur pétrolier ou parapétrolier au-delà de 20 M USD).

Dans ces conditions, les flux d'investissement direct étranger se trouvent fortement contraints. Même si l'évaluation de leur montant reste extrêmement aléatoire, le chiffre avancé par le FMI (international financial statistics) de 200 M USD pour 2002 (après 94 M USD en 2001 selon la même source) témoigne de cette faiblesse. Il est vrai cependant que les IDE stricto sensu ne reflètent pas la réalité des financements opérés en Iran par des sociétés étrangères, qui peuvent prendre par exemple la forme de contrats de buy-back, dont l'importance est considérable (ainsi les phases 2 et 3 de South Pars, financées pour 2 Mds USD par Total).

Une nouvelle loi sur les investissements étrangers, longtemps bloquée par les luttes d’influence qui opposent les Réformateurs et les Conservateurs, a été votée à l’été 2002. Elle offre, certes, quelques améliorations comme la possibilité pour une société étrangère de détenir 100% du capital d’une société iranienne ou la prise en compte dans le champ de la loi des buy-backs et les BOT mais elle maintient de fortes contraintes : les étrangers sont toujours exclus de l’amont pétrolier et gazier, les investissements doivent toujours faire l’objet d’une autorisation pour bénéficier de la nouvelle législation, l’exequatur des décisions arbitrales rendues à l’étranger est toujours soumis à l’approbation des autorités iraniennes pour les entités publiques, la rapatriation des dividendes, bien qu’autorisée, reste limitée par l’étroitesse du marché libre des devises ou la nécessité d’exportation.
La loi introduit même de nouvelles limites par des plafonds sectoriels limitant la présence étrangère et soumettant un peu plus l’investisseur étranger à l’appréciation des autorités iraniennes. Quant aux privatisations elles ont, pour l’instant, été menées de manière cosmétique, les entreprises « privatisées » passant le plus souvent du giron du ministère technique à celui du Fonds de la Sécurité Sociale.
Notons enfin une insuffisante protection des droits de propriété intellectuelle. L'Iran n'étant pas membre de l'OMC et donc n’ayant pas ratifié les accords TRIPS, le cadre juridique en matière de droit des affaires et de propriété reste relativement modeste ou peu efficace. L'isolement diplomatique est également un obstacle majeur pour l'examen de la demande d'adhésion de l'Iran à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). L'entrée de l'Iran dans l'OMC apporterait une série d'avantages : une réduction du tarif moyen, une élimination des quotats et des licenses d'importation, les compagnies étrangères pourront entrer dans les affaires de distribution (en permettant l'établissement d'entreprises à capitale 100 % étrangers dans les secteurs de la distribution, de ventes maritime et des services), une plus grande uniformité dans l'évaluation douanière, la moindre incertitude légale et la plus grande transparence, protection de la propriété intellectuelle et industrielle, etc.

Une présence française modeste : Les implantations capitalistiques françaises sont peu nombreuses (une douzaine) et datent en général de la période de l’Iran impérial. Elles n’ont souvent qu’une activité réduite et, en règle générale, la société française est minoritaire. Legrand et Seb ont cependant réussi à prendre le contrôle majoritaire de leur filiale iranienne au début des années 90. Depuis la Révolution, seules quelques opérations ont été réalisées pour des montants limités : Florimont Desprez pour la production de semences betteravières, Saunier Duval pour la fabrication de chaudières à gaz, Farminvest / Castel pour l’embouteillage d’eau minérale, Schneider pour l’assemblage local de commutateurs et de disjoncteurs pour basse et moyenne tension et TFE pour la production de lubrifiants. Enfin, Technip a acquis une participation minoritaire (20 %) dans la société d’ingénierie iranienne Nargan, son partenaire habituel sur les projets pétrochimiques iraniens.
Quelques investissements directs sont en cours de négociation dont certains très importants par leur montant. Les négociations se révèlent difficiles buttant souvent sur l’interprétation très étroite de la loi sur l’investissement étranger par les autorités iraniennes.
Au total, le stock d’investissement direct français en Iran est estimé à 20/25 M$. Ce chiffre ne comprend pas les contrats de buy-back dans le domaine pétrolier et gazier remportés par le groupe TotalFinaElf qui ne sont pas à proprement parler des investissements (même si les autorités iraniennes, pour étoffer les chiffres, les comptent comme des investissements) mais des contrats de service doublés d’une opération financière, aucun transfert de propriété n’ayant lieu.
L’accord d’encouragement et de protection réciproque des investissements, signé au mois de mai 2003 lors de la visite en Iran du Ministre Français délégué au Commerce Extérieur apporte, une fois ratifié, en juin 2004, certaines améliorations indéniables aux conditions d’investissement en Iran. Voir le site du Sénat.

Par ailleurs, des réserves peuvent subsister parmi les Etats qui ne reconnaissent pas le régime américain de sanctions extra-territoriales instauré par la loi d'Amato. Ainsi, les progrès de la négociation d'un accord de partenariat et de coopération entre l'Iran et l'Union européenne, qui a démarré en décembre 2002, sont étroitement liés à ceux du dialogue politique, notamment sur les questions de la prolifération nucléaire, des droits de l'homme, du terrorisme et du soutien au processus de paix au Proche-Orient.


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