mardi, octobre 02, 2007

Les entreprises françaises dans l’expectative

Les entreprises françaises dans l’expectative

Le Figaro du 22 septembre 2007

Priées par le gouvernement de brider leur engagement en Iran, les grandes sociétés ne veulent pas jeter l’éponge mais se montrent prudentes.

NE PAS INVESTIR en Iran, ne pas répondre aux appels d’offres : les possibles sanctions commerciales à l’égard de la République islamique, prônées par le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner, incitent les entreprises françaises à la plus grande prudence. Qualifiées de simples conseils par le Quai d’Orsay, ces propositions laissent les dirigeants économiques dans l’expectative. Malgré la bonne quarantaine de grandes sociétés répertoriées à la Mission économique de Téhéran, l’Iran n’est que le 33e fournisseur de la France et son 34e client. En tête de liste, Total et Gaz de France, deux des plus importantes d’entre elles, ont été évoquées par Bernard Kouchner.

Le pétrolier a longtemps négocié en vue de la création d’une usine de gaz liquéfié à proximité du gisement de South Pars dans le golfe Persique ; GDF devrait en assurer la commercialisation. Aujourd’hui, les négociations sont au point mort. Si Total refuse de commenter les propos de Bernard Kouchner, le groupe n’a pas l’intention, non plus, de jeter l’éponge.

L’investissement de plusieurs milliards d’euros est une opération de longue haleine, enclenchée depuis cinq ans déjà. « Nous réétudions le projet car son coût a été multiplié par deux à cause de la forte hausse des coûts des contractants, explique une porte-parole de Total. Pour décider d’un éventuel investissement, le moment venu, nous prendrons évidemment en considération le contexte général. »

L’industrie automobile est dans une position moins sensible. Renault a déjà investi 300 millions de dollars chez un équipementier (Renault Pars) qui fournit les deux constructeurs locaux (Iran Khodro et Saipa) de Logan (Tondar en persan). L’opération, irréversible, est le plus important investissement dans le pays depuis la révolution islamique. « Notre investissement a déjà commencé et nous continuerons la collaboration avec nos deux partenaires », indique le constructeur français.

PSA Peugeot Citroën fournit des éléments aux deux mêmes partenaires. En 2006, Iran Khodro a assemblé quelque 220 000 Peugeot (modèles 206 et 405), Saïpa monte des Citroën Xantia (11 000). « Nous vendons des pièces et n’avons pas l’intention d’investir. Pour nous, rien ne changera, sauf si évidemment nous nous dirigeons vers une guerre », souligne le deuxième constructeur européen.

Dans l’industrie pétrolière, les entreprises de taille moyenne restent vigilantes. « Pour nous, il ne s’agit que d’une vague recommandation », indique Michel Morgenthaler, responsable des relations extérieures chez Solétanche, société qui oeuvre dans les fondations spéciales.

« Nous attendons et ne prenons aucune mesure irréversible, poursuit-il. Nous avons connu une situation presque identique en Algérie. Nous sommes partis, puis revenus lorsque les affaires ont repris. En Iran, les déclarations de Kouchner ne sont pas de nature à nous empêcher de regarder une affaire. »

Président de Coyne et Bellier, bureau d’ingénierie spécialisé dans les barrages, Bernard Tardieu s’étonne des déclarations de Kouchner. « Ces propos ne me paraissent ni très raisonnables, ni très efficaces, souligne-t-il. Une telle déclaration ne peut que gêner les entreprises qui travaillent sur le terrain et cela sans influencer le moins du monde le président Mahmoud Ahmadinejad. » Quoi qu’il en soit, le risque de guerre n’a jamais été vraiment propice aux investissements...

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