lundi, novembre 15, 2004

Relations économiques Iran - Arménie, le beau fixe

Par Laurence RITTER à Erevan
Le 03/11/2004

Paradoxal mais vrai, les relations entre l’Iran et l’Arménie sont au beau fixe. Si l’histoire a montré que les Perses et les Arméniens se sont souvent affrontés au cours de conflits sanglants, l’indépendance aura provoqué un réchauffement réel. Aujourd’hui, Erevan et Téhéran se réunissent autour de projets communs.

Parce que ses frontières sont toujours fermées par le blocus imposé par la Turquie lors du conflit du Haut-Karabakh, l’Arménie a appris à les contourner en faisant transiter ses importations et exportations par le nord et la Géorgie, mais aussi par le sud et l’Iran.

Tout le long de l’unique axe qui relie l’Arménie à l’Iran, serpentant dans le Zanguézour jusqu’à la ville frontière de Meghri, les poids lourds iraniens roulent à plein pour acheminer leurs marchandises jusqu’à Erevan.
Les marchandises iraniennes abondent sur tous les marchés d’Erevan, du produit vaisselle aux vêtements en passant par des biens d’équipements courants. Surtout, le projet d’acheminer le gaz iranien depuis Téhéran jusqu’en Arménie via la construction d’un pipeline est dans sa phase finale. Les accords sont signés et le tracé du gazoduc décidé.
L’Arménie, qui revend déjà son électricité, sera très rapidement quasi autosuffisante en énergie de base. Un enjeu vital après les années 1992 et 1993 : pendant deux ans, l’électricité et le gaz coupés, l’Arménie survivait en brûlant le bois des portes d’immeubles et des arbres dans d’antiques poêles à bois. Aujourd’hui, le gaz a été réinstallé dans un nombre important d’immeubles, les conduites refaites, les compteurs reposés.

Quant à la communauté arménienne d’Iran, sans doute l’une de plus florissantes de toute la diaspora jusqu’à la révolution islamique, elle traverse de plus en plus facilement la frontière, achète à Erevan appartements et petites boutiques. Elle prépare en fait moins son installation définitive qu’elle ne se s’assure un refuge potentiel en cas de durcissement du régime.
Les Irana Hay (Arméniens d’Iran) constituent sans doute la catégorie diasporique la plus représentée dans le pays. Elle parle l’arménien oriental, comme le reste du pays, avec un accent chantant, et sa présence se fond naturellement dans le paysage national, le tout sous la bénédiction de Erevan et de Téhéran réunis autour de projets communs. Une démonstration supplémentaire, si l’on en avait encore besoin, que dans ce complexe Caucase, les liens entre Etats ne recoupent pas forcément les lignes d’appartenance religieuse.

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