dimanche, février 18, 2007

Iran, vers un embargo discret

Source : Le Monde, 17 février – Par Yves Mamou –

Officiellement, aucun embargo généralisé ne sanctionne l'Iran soupçonné de vouloir devenir une puissance nucléaire militaire. Et cela, même si, depuis décembre, le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté une résolution prévoyant des sanctions en cas d'exportations de matériels liés aux programmes nucléaire et balistique de l'Iran.

Pourtant, l'inquiétude monte. Ainsi, vendredi 16 février, le Japon est entré dans le jeu des sanctions en décidant un gel des avoirs financiers de 10 groupes et 12 individus soupçonnés d'être liés au programme d'enrichissement de l'uranium. De leur côté, les Etats-Unis ne sont pas restés inactifs. A défaut de mobiliser la communauté internationale pour mieux isoler l'Iran, ils ont commencé d'agir seuls.

Ainsi, le système bancaire iranien qui permet au pays d'encaisser les recettes des exportations de pétrole et de financer les importations est progressivement asphyxié. La cinquième banque iranienne, la banque Sepah, s'était déjà vue interdite de transactions en dollars sur le territoire américain. En septembre 2006, ce fut au tour de la banque Saderat de se voir accusée d'entretenir des liens avec les organisations terroristes et priée de cesser toutes transactions sur le territoire américain.Les banques iraniennes ont alors reporté leurs transactions en dollars sur des établissements européens, notamment la Commerzbank. Mais d'amicales pressions américaines sur la grande banque allemande ont amené celle-ci à y renoncer.

Discrètement, le Trésor américain applique à la lettre la réglementation restrictive sur les transferts de fonds à destination de personnes morales ou privées soupçonnées d'entretenir des liens avec le terrorisme. D'où un climat franchement dissuasif à l'égard de tout organisme financier non américain soucieux de nouer des relations commerciales avec des entités de nationalité iranienne. L'UBS et le Crédit suisse pour la confédération helvétique, l'Intesa Sanpaolo pour l'Italie, la Barclay's et la HSBC en Angleterre, LCL et la Société générale en France ont réduit sensiblement leurs relations commerciales avec l'Iran, et certains comme la Commerzbank ont rompu les ponts.

Et pour montrer qu'elle ne plaisante pas, l'administration américaine a, en 2006, ouvert une enquête officielle sur les transactions de la banque néerlandaise ABN Amro.

Le déploiement de la flotte américaine dans les eaux internationales proches de l'Iran crée également un climat belliqueux néfaste aux investissements. Et bon nombre de projets pétroliers sont aujourd'hui gelés. L'Iran n'est pas réellement asphyxié par cet encerclement économique, mais le coût de fonctionnement de son économie en est considérablement plus élevé.